Toc toc toc toc toc toc
3h03
L’homme n’eut pas besoin de regarder sa montre pour savoir l’heure qu’il était.
Son cœur se mit à battre plus fort, au point que l’écho des coups se faisait dans ses tempes.
Toc toc toc toc
3h04
Quatre coups plus forts que les six de trois heures trois.
Cela faisait trois semaines, peut-être plus, que l’homme avait commencé à les entendre. Les deux premières nuits, seuls ceux de 3h04 l’avaient réveillé. Puis ce furent ceux de 3h03.
Il avait commencé par accuser son chien, mais quand il vit que l’animal le regardait anxieux, il comprit qu’il n’y était pour rien.
Au bout d’une semaine, il purgea les radiateurs, sans effet. Il monta dans le grenier vérifier la ventilation, grimpa sur le toit vérifier que rien ne s’y était accroché, là encore l’effet fut nul.
C’est alors que l’homme remarqua la régularité des coups, autant horaire qu’en nombre.
Il avait fait déboucher ses canalisations, au cas où, mais il avait su que c’était peine perdue.
Désormais, il était persuadé que les coups venaient de l’intérieur du mur en face de lui, demain il ferait le nécessaire.
Quand il eut fini de casser le placo du mur afin d’essayer de trouver la source de ce bruit, il alla vérifier par cinq fois, mètre en main, la dimension des deux chambres accolées, et celle du couloir.
Il avait découvert un espace de cinquante centimètres entre les deux chambres, un écart qui cachait un puits d’accès rectangulaire, qui était scellé d’une lourde plaque de béton. Il savait que son lotissement, et tout le quartier était bâti sur d’anciennes mines d’ardoises qui avaient été inondées, mais il n’aurait jamais pensé découvrir un puits d’accès entre ses murs.
Mais ce ne fut pas là sa seule découverte. À côté du puits se trouvait un ancien casque de mineur recouvert par la poussière et déformé, comme si une lourde pierre avait été abattue à l’avant de celui-ci.
Une sueur froide glissa alors le long de son dos qui était trempé de sueur, et ce pas seulement à cause l’effort.
Dès le début de la mise à nu de son mur, son chien s’était mis à aboyer, hurler à la mort, faire des cercles sous la nervosité, à tel point que l’homme avait été obligé de le mettre dans le jardin. Mais là son chien n’aboyait plus, il partit vérifier, la bête s’était enfuie.
Toute la soirée, l’homme chercha des informations sur la mine sous ses pieds. Le seul fait notable qu’il découvrit, fut qu’elle avait été fermée du jour au lendemain dans les années soixante-dix, sans explication, alors même que certains ex-mineurs certifiaient qu’elle était toujours riche en ardoise, et exploitable. Son inondation avait elle aussi été réalisée dans les plus brefs délais.
Cette nuit-là, l’homme n’avait pu envisager de dormir dans sa chambre, et avait trouvé refuge dans son salon. Mais cela ne l’empêcha pas d’entendre clairement les coups, et après le dernier coup de 3h04, il crut entendre un bruit plus sourd, comme étouffé, mais il n’était pas certain que son imagination ne lui eût pas joué de tour. Et cette nuit-là, il ne put s’endormir que lorsque le soleil se leva.
Mais quant à son réveil, il alla chercher de quoi se vêtir dans sa chambre, il s’enfuit de chez lui, terrorisé. La plaque de béton avait été fendue en deux durant la nuit, laissant le puits désormais béant sur l’obscurité, et emplissant la pièce d’une odeur atroce, presque oppressante. Quant au casque, il avait disparu, et l’homme était certain d’avoir discerné la trace humide d’une main dans la poussière, à côté de là où l’antiquité se trouvait la veille.
L’homme roula plus de trois cents kilomètres avant de s’arrêter dans un hôtel quelconque. En chemin il avait acheté de l’alcool, afin de réussir à sombrer dans le sommeil cette nuit-là, car sans aide, il sut qu’il n’y arriverait pas.
3h03
L’homme qui s’était endormi à la limite du coma éthylique n’entendit pas les six coups dans le mur en face de lui
3h04
Aucun coup ne résonna, dans la chambre désormais vide, où seul régnait une odeur d’alcool et d’obscurité.
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